Une décennie de ruptures et de révolutions musicales
Impossible de comprendre l’émergence et la trajectoire singulière de Kery James sans sonder le bouillonnement qui irrigue le rap français des années 1990. Ce fut une époque d’inventions brutes : les codes se cherchent, se créent, s’entrechoquent, portés par une génération décidée à faire entendre la voix des exclus dans une France en crise, perméable aux fractures sociales et raciales.
En 1990, le hit “Bouge de là” de MC Solaar entre dans l’histoire : il propulse le rap hexagonal sur les ondes, preuve tangible d’un virage socioculturel. La décennie est ensuite scandée par les succès de Suprême NTM, IAM, Ministère AMER, Assassin. En 1994, près de 400 000 exemplaires du mythique d’IAM seront écoulés, instaurant le rap comme force populaire et artistique (source : Les Inrockuptibles, 2017).
Mais au-delà des chiffres, le vrai choc fut d’ordre esthétique et politique : une génération d’artistes invente une nouvelle grammaire de l’expression urbaine, biblique, rageuse, poétique. Ce socle, Kery James y puisera l’essence de son style et de son engagement.