Perspectives : entre héritage et nouvelle génération
Si l’inspiration slam et poésie urbaine saute aux oreilles dans l’œuvre de Kery James, c’est parce qu’il représente un maillon rare au sein de la musique urbaine française : celui du dialoguiste, du transmetteur de mémoire, du poète du bitume. Le succès critique et populaire - plus de 300 000 albums vendus pour Réel (IFOP Music, 2009), des tournées à guichets fermés, un film et une pièce de théâtre plébiscités - confirme que cette parole porte loin et fort.
Face à l’uniformisation de certains pans du rap, Kery James persiste à rappeler le pouvoir subversif du mot, héritier d’une tradition qui va du griot africain au conteur des cités. En filiation directe avec le slam, la poésie urbaine, mais aussi le hip hop américain le plus conscient, il incarne un pont générationnel. Chacun de ses morceaux est un atelier de poésie adressée, une invitation à ne jamais dissocier musique et littérature, beat et métaphore, souffle et transmission.
La relève existe déjà, dans le sillage de ses textes : des artistes comme Gaël Faye, Chilla, Éloquence, ou l’éclosion de scènes slam dans les capitales régionales françaises, montrent que le raffinement littéraire du verbe et l’exigence du propos sont loin d’être incompatibles avec la rue et le quotidien. Chez Kery James, le poète urbain n’est pas un titre, c’est un geste, un témoignage—et une promesse d’avenir.